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Ma première COP, entre espoirs et déceptions pour la biodiversité !  

J’étais présent à la COP15 (conférence des parties), à Montréal, pour suivre le nouveau cadre mondial sur la biodiversité.  Cette COP15 de l’ONU se tenait du 7 au 19 décembre 2022. Ces sommets internationaux réunissent les délégations de plus de 190 pays pour apporter des solutions concrètes, à un niveau mondial, sur des thématiques environnementales, en l’occurrence, ici, la biodiversité.  

Âgé de 24 ans et directeur général du think tank « Ecologie responsable », j’ai eu la chance d’être sélectionné pour représenter la jeunesse à cette COP15. Participer à un tel évènement est un grand honneur mais étant complètement néophyte, j’ai dû suivre des formations, en amont, pour comprendre les mécanismes décisionnels de cette institution. 

Le programme était dense et l’enjeu important : définir un nouveau cadre mondial pour la biodiversité. Se dire que l’on va avoir l’opportunité de faire avancer les choses dans un domaine qui concerne la vie sur Terre est enthousiasmant. Et en même temps, un peu terrifiant au regard des défis gigantesques : un million d’espèces animales et végétales sont menacées d’extinction.

« La COP de la dernière chance »

Cette expression de la dernière chance revenait souvent. Selon l’ONU, aucun des objectifs fixés lors de la dernière COP (COP14), en 2018, n’a été pleinement tenu, et de loin1COP14 Biodiversité : 196 gouvernements acceptent d’intensifier leurs efforts pour la nature d’ici 2020 et au-delà – UICN France.

Ce sentiment d’inutilité de la COP est fort dans la population : dans Montréal, on pouvait entendre tout autour du Palais des congrès, où se tenait ce sommet international, le bruit de manifestants hostiles, appelant à boycotter l’évènement et même à le bloquer. Il est vrai que le continent américain est régulièrement le terrain de jeu des blocages altermondialistes notamment avec la prise d’assaut, en 2021, d’un oléoduc dans le Minnesota. 

Les policiers ne laissaient passer dans le secteur que les délégués munis d’un « priority pass ». C’est donc empreint de ce sentiment d’urgence écologique mais également politique (on commence à assister, en effet, à une réelle prise en compte de l’environnement dans les programmes électoraux mais avec une impasse majeure sur la biodiversité) face à une colère grandissante mondiale, que j’ai participé aux évènements de la conférence des parties. Mais pour moi, la réponse devait être institutionnelle. Je pense que la crise doit pouvoir se résoudre à travers les choix des institutions. L’obstruction et le saccage ne sont pas des réponses à la hauteur des enjeux et réduisent, souvent de manière simpliste, la complexité des débats. 

Comme « délégué jeune », j’ai eu une large possibilité d’actions. Nous étions 13 jeunes français désignés après une processus de sélection, au milieu des « représentants jeunes » envoyés par chaque pays.Je pouvais suivre les négociations, prendre la parole sur certains dossiers et proposer un amendement, si j’avais le soutien d’au moins un Etat. En parallèle de ces discussions officielles, sur l’heure du déjeuner et en soirée, il était possible d’assister à des side-events. Il s’agissait de conférences de 90 minutes réalisées par des experts non-gouvernementaux sur des sujets liés à la biodiversité. Il faut savoir que, dans le même temps, trois négociations officielles se poursuivaient, il était donc impossible d’être présent partout. En plus de cela, au niveau de l’Union européenne, il y avait des négociations entre Etats pour parler d’une voix unifiée, ce qui rajoute encore un peu plus de complexité. 

« Le 30×30 », une ambition mondiale 

Le sujet de discussion principal est le plan « 30×30 L’objectif : préserver 30% des terres et des mers d’ici 2030.Très concrètement, cela veut dire que presque un tiers de la planète serait juridiquement protégée. Ce programme ambitieux doit permettre de réduire fortement la déforestation et même de recréer des écosystèmes. A ce titre, j’ai pu observer, au cours de cette première semaine, certaines aberrations. Par exemple, les corridors écologiques, c’est-à-dire les passages naturels qui permettent à la faune de se déplacer et à la flore de se disperser, n’ont pas forcément le statut d’aires protégées, ne bénéficiant donc pas de cette protection salvatrice. Ainsi, les plantes et les animaux rencontrent toute une série d’obstacles sur leur route. 

Il est important d’apprendre rapidement le langage de la COP, avec un vocabulaire particulier et parfois trompeur. A titre d’exemple, une réunion « groupe de contact » est une réunion de négociations. Un nombre stupéfiant d’acronymes est aussi à ingérer : CBD (Convention on Biological Diversity), ZAN (Zéro Artificialisation Nette), PNUE (Programme des Nations Unies pour l’Environnement) …

 Mais quelques déceptions

Le sentiment qui me gagne, au cours de cette conférence internationale est la stupéfaction, face à la lenteur des processus. Au bout d’une semaine, Il restait encore 14 000 parenthèses (amendements) à étudier en quelques jours, avec un texte qui, au gré des discussions, perdait de son ambition. Il est dommage, aussi, que les seuls représentants des Etats dans ces instances soient les ministres (le ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires pour la France). En effet, les présidents et premiers ministres ne sont pas invités. Face à l’ampleur de la tâche, un marqueur fort avec la présence du plus haut sommet de l’exécutif aurait été un beau symbole mais aussi un signe de volontarisme politique international. 

Finalement, le texte a bien été approuvé par la totalité des Etats, voilà une surprise ! Maintenant, la question de l’application concrète des mesures prises va se poser. Mais, je veux croire que les gouvernements nationaux seront à la hauteur de l’Histoire pour prendre les mesures qui s’imposent pour la nature, et pour l’Homme. Réponse dans deux ans lors de la COP16 !

Illustré par Ferréol Delmas

Ferréol Delmas

Ferréol Delmas

Director général du think-tank "Écologie responsable", partenaire de KIP.
Contributeur régulier.

Head of the "Responsible ecology" think-tank, partner of KIP.
Regular contributor.