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Fan de football absolu, j’ai aussi décidé de boycotter la Coupe du Monde au Qatar

Depuis petit, le football fait partie de ma vie. J’ai bien d’autres passions, mais celle-ci est importante. J’y ai d’abord joué, avec mes amis, à l’école et à côté de chez moi. Puis j’ai regardé beaucoup, beaucoup de matchs. Des centaines au moins, peut-être des milliers. 

Je suis de ceux qui connaissent tous les joueurs de Ligue 1, ou presque.

Je suis de ceux qui, quand ils ont le temps, pendant les vacances, s’abonnent aux chaînes payantes pour ne rater aucun match, ou presque.

Je suis de ceux qui attendent le mardi et le mercredi soir avec impatience et sont heureux quand l’hymne de la Ligue des Champions retentit.

Je suis de ceux qui, pendant la Coupe du Monde et l’Euro, regardent tous les matchs, et pas uniquement ceux de leur pays. 

Je suis de ceux qui parient pour vivre les matchs encore plus intensément. 

Je suis de ceux qui regardent les matchs en famille et entre amis, à la maison, au bar, au restaurant.

Je suis de ceux qui peuvent débattre des heures des derniers matchs, transferts ou événements liés au football.

Je suis de ceux qui apprécient autant un beau film ou un grand livre qu’un match intense.

Je suis de ceux qui croient qu’à toutes les échelles, le football est un formidable vecteur de lien social. 

En classe préparatoire, j’attendais avec impatience de rentrer chez moi le samedi après-midi pour me reposer et surtout, regarder un match de Premier League, moment parfait de détente après une semaine bien remplie. A mes côtés, mon ancienne copine a même commencé à aimer regarder les matchs et connaître de très nombreux joueurs. Pour tout dire, elle a même fini par particulièrement apprécier le gardien du FC Nantes…

Mais on ne peut pas aimer à n’importe quel prix. 

Un non-choix

Cet article n’a pas vocation à retracer l’étendue des scandales liés à la Coupe du Monde au Qatar : choix du pays hôte, interférence politique, problèmes environnementaux, droits humains et ouvriers décédés, droit des femmes….Tous sont des problèmes majeurs. Tous constituent une raison suffisante pour boycotter cet événement. Alors, tous ensemble cumulés ? 

Cet article est simplement un constat. 

Un triste constat d’un fan de football qui aurait aimé profiter du spectacle que les meilleurs joueurs du monde ont à offrir. 

Mais cela n’est pas possible. 

Pas possible car on ne peut pas profiter d’un spectacle qui baigne dans le sang et l’esclavagisme moderne. 

Pas possible car on ne peut pas cautionner la catastrophe environnementale que représente cet évènement. 

A ce rythme là, il risque de ne plus y avoir beaucoup de Coupes du Monde se jouant sur du gazon vert. Si tout se passe comme si de rien n’était, cela recommencera. Cela recommence déjà, et en pire : les jeux asiatiques d’hiver 2029 viennent d’être donnés à l’Arabie Saoudite et auront donc lieu dans le désert. De la neige, en plein milieu du désert. 

Pas possible car fermer les yeux n’est jamais la solution. Nous avons fermé les yeux en 2018 lorsque la Coupe du Monde s’est déroulée en Russie. Et 4 ans plus tard ? 

Alors non, ce boycott ne changera sûrement rien, du moins à court terme. Les ouvriers décédés ne seront pas sauvés. Les émissions mondiales ne diminueront pas drastiquement. Les décisions stupides et inconsidérées ne disparaîtront pas. Mais que peut-on faire d’autre ? 

Une Coupe du Monde vit par ses spectateurs et rien d’autre, que ce soit en termes économiques (billets, tourisme, produits dérivés, droits télévisuels) ou de ferveur. Avons-nous vraiment envie de faire vivre cet évènement ? Y a-t-il ici matière à faire la fête ? Pour qui se pose la question avec honnêteté, la réponse est claire. 

Peut-être qu’il est hypocrite, inutile et ridicule de boycotter cet événement alors que nous acceptons tant d’autres abus dans nos vies quotidiennes. Mais ici, le stade de l’acceptable, du compromis ou de la transition n’est plus envisageable. Accepter cela, c’est accepter l’absurde. C’est accepter de laisser triompher le contraire de tout ce que nous essayons de mettre en œuvre pour rendre notre monde meilleur. C’est faire gagner des valeurs diamétralement opposées aux nôtres. 

Dès lors, avons-nous d’autres choix que de détourner le regard ? 

Des matchs bien sûr. 

Eliott Perrot

Eliott Perrot

Étudiant français en Master in Management à HEC Paris (Promotion 2025).
Membre de KIP et contributeur régulier.

French student in Master in Management at HEC Paris (Class of 2025).
Member of KIP and regular contributor.