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Illustration par Kim Provent pour KIP.

Pourquoi Donald Trump peut encore gagner l’élection présidentielle

À moins de deux semaines de l’élection présidentielle des États-Unis, les sondages semblent unanimes pour donner le candidat démocrate, Joe Biden, vainqueur sur son concurrent. Pourtant en 2016, Hillary Clinton était aussi perçue comme favorite avec plus de 70% de chances de gagner à la veille de l’élection selon Reuters. Dès lors, si les sondages de 2020 donnent une avance démocrate plus importante qu’en 2016, Donald Trump peut encore contre toutes attentes s’emparer de la Maison Blanche.

Tout d’abord, Donald Trump a tenu le même discours qu’en 2016 pendant sa campagne et peut alors gagner les mêmes swing states qui ont fait sa victoire. Le « mur bleu », la Pennsylvanie, le Michigan et le Wisconsin qui représentent en tout 46 grands électeurs avaient rompu en 2016 avec quarante années de vote démocrate pour se tourner vers l’ancien présentateur de télé-réalité. Le discours républicain axé sur le retour de l’industrie et des emplois, la lutte contre la concurrence chinoise et le développement de l’exploitation des hydrocarbures avait séduit la classe ouvrière. Or, le bilan de Donald Trump sur ces points-là est plutôt positif, le taux de chômage atteignant un taux historiquement bas en janvier 2020. Si l’industrie métallurgique peine toujours, la production automobile a été relancée en particulier dans le Michigan avec Chrysler qui y a créé de nouvelles usines. L’électorat ouvrier peut s’en souvenir au moment de déposer son bulletin de vote. En Pennsylvanie, Trump séduit aussi par son soutien inconditionnel au fracking, l’extraction du gaz de schiste avec des conséquences environnementales néfastes alors que Biden s’est contredit plusieurs fois en se posant contre puis finalement pour sous conditions lors du dernier débat télévisé. Or la Pennsylvanie faisait partie des surprises de 2016 et même si Biden y est donné gagnant, elle reste un enjeu clé de l’élection.

Ensuite, l’aile gauche du parti démocrate peut faire peur à tous les électeurs qui n’ont pas encore pris leur décision. Biden représente le courant modéré du parti démocrate actuel, refusant ainsi que Trump le qualifie de socialiste lors du dernier débat. Sa colistière Kamala Harris se situe dans le même courant, elle était ainsi très dure dans son rôle de procureure en Floride en appliquant des peines longues qui déplaisaient à toute une partie des démocrates. Cependant, le parti démocrate est en pleine mutation et toute une aile très à gauche émerge, portée par de nombreuses personnalités politiques plus jeunes. Les électeurs peuvent avoir peur que cette nouvelle mouvance force le président à prendre des mesures très à gauches. Par exemple, toutes les questions raciales suscitent des tensions très fortes au États-Unis. Le président Biden a dénoncé un « racisme systémique » aux États-Unis lors du deuxième débat, alors que l’existence même d’un racisme systémique est loin d’être évidente pour tous. La question environnementale est aussi un exemple intéressant car Biden veut mettre en place le Green New Deal, porté par Alexandra Ocasio-Cortez qui incarne la mouvance plus jeune et plus à gauche des démocrates. Cependant, ce projet n’est pour l’instant qu’une ébauche de 14 pages avec très peu de données chiffrés et d’objectifs clairs. La question est alors de savoir jusqu’où Joe Biden va aller dans la lutte contre le changement climatique et si certains électeurs n’auront alors pas peur que cela se fasse au détriment de la croissance économique et de la compétitivité américaines.

Enfin, Trump peut encore gagner car il a en face de lui un parti démocrate qui n’a pas bien intégré la leçon de 2016. Hillary Clinton a en partie perdu car elle apparaissait comme une caricature de l’establishment américain. Or Biden, à 77 ans, est encore plus vieux qu’Hillary Clinton qui en avait 69 en 2016. Il a du mal à donner une image dynamique et jeune : pour preuve son slogan de campagne no malarkey soit « pas de foutaises » a été largement perçu comme vieillot. Ensuite, Biden rencontre les mêmes problèmes qu’Hillary Clinton au niveau de la communication. Hillary Clinton en 2016 peinait se défaire de l’affaire de ses emails, Biden en 2020 doit faire face aux accusations de corruption de son fils et de lui-même en Ukraine et en Russie. Les deux démocrates avaient respectivement considérés ces accusations comme infondées et dénonçaient une mise en scène grotesque au lieu de mettre en avant des explications claires sur les faits.

Trump conserve ainsi largement ses chances dans la course présidentielle. À la veille du scrutin, tous les yeux sont désormais fixés sur les swings states, en particuliers dans les grands lacs et en Floride.

Sources

https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/11/09/comment-la-victoire-de-donald-trump-a-t-elle-pu-echapper-aux-sondeurs-et-aux-medias_5028104_4355770.html

https://www.usinenouvelle.com/editorial/donald-trump-s-autocongratule-de-sa-reconstruction-de-l-industrie-americaine.N646188

https://www.lefigaro.fr/international/qui-est-kamala-harris-premiere-colistiere-noire-d-un-candidat-a-la-presidence-americaine-20200811

https://www.foxnews.com/politics/hunter-biden-revelations-roil-2020-race-hours-before-trump-biden-take-debate-stage

https://edition.cnn.com/2020/10/18/media/new-york-post-hunter-biden-reliable/index.html

Stanislas Jourdan

Stanislas Jourdan

Étudiant français en Master in Management à HEC Paris (Promotion 2024). Membre de KIP et contributeur régulier.

French student in Master in Management at HEC Paris (Class of 2024). Member of KIP and regular contributor.